jeudi 19 avril 2012

Paroles d'adolescent

C’est un adolescent de seize ans, il veut arriver à quelque chose dans la vie, dit-il. Il ne veut pas vivre comme ses parents, qui l’ont eu trop jeunes, ils avaient à peine dix-neuf ans. Sa mère n’a pas terminé sa formation, voulant rester à la maison avec son enfant. Elle lui a donné tout son amour, l’a nourri, habillé, soigné, accompagné sur son chemin de vie. Aujourd’hui elle travaille au supermarché du village, pour un salaire de misère. Mais au moins elle cotise pour la retraite qu’elle ne touchera pas, mais elle et les enfants ont une assurance maladie. Elle a un travail, c’est déjà ça. Mais elle travaille dur, est fatiguée quand elle rentre, sa pauvre mère. Son père, lui, n’a pas de travail. Il fait le taxi, parfois, quand quelqu’un a besoin d’aller en ville. Ca lui permet de gagner un peu d’argent, mais très peu, le prix de deux ou trois paquets de cigarettes. Le reste du temps, il aide les grands-parents, ses parents, à faire les tâches qui deviennent difficiles pour eux avec l’âge.

Lui, il va à l’école dans une petite ville à quelque kilomètres de chez lui. Ses parents ont à peine de quoi lui payer l’abonnement de bus et le sandwich pour le repas. Ca craint, de ne pas s’acheter à manger au buffet de l’école, les copains, eux, achètent leur déjeuner là-bas. Mais ça mère lui a dit que ça craignait ou non, c’était comme ça. Ses fournitures/cahiers d’école, se sont ces grands-parents qui les lui achètent. Quand il rentre de l’école, il s’arrête chez eux, leur raconte sa journée, mange quelque chose et rentre chez lui. Son petit frère aussi mange chez ses grands-parents. Même sa mère, souvent, en rentrant du magasin.

Son école ressemble à une école de commerce en Suisse. Il n’aura pas de bac, mais son diplôme lui permettra de faire les études de droit international qu’il voudrait, s’il trouve une bourse d’ici-là et s’il peut aller vivre dans la ville universitaire la plus proche. Et s’il ne peut pas aller à l’uni, il trouvera un travail de bureau, à la douane ou chez la police, ou dans un autre bureau d’Etat. Il ne veut pas de travail physique qui fatigue trop et ne nourrit pas assez. 

Il est amoureux, comme on est amoureux à seize ans. Il n’entend pas ce qu’on lui dit, plongé dans le message qu’il écrit à sa dulcinée. Elle est jolie, peut-être même me montrera-t-il sa photo sur facebook. Mais qu’on ne s’en fasse pas, explique-t-il, il ne va pas faire comme ses parents. Il est juste un peu amoureux, il n’a pas le temps pour une copine, vraiment. Juste un peu. Il veut terminer sa formation, il veut avoir une vie meilleure. 

Il aime son village, sa terre natale. Mais s’il devenait avocat, ce serait mieux d’aller s’établir en ville, ce n’est pas très loin, à une heure de route, il serait proche du village tout de même. 

Lui, c’est mon neveux. Un adolescent de seize ans bien sérieux. Il a des plans pour sa vie, m’explique-t-il. J’espère de tout coeur qu’il arrivera à ce qu’il veut.

3 commentaires:

Guillaume a dit…

Très joli texte ! (attention à "neveu" ;) )

kat a dit…

S'il y avait un mot en français... En hongrois, c'est le même. Et en fin de compte, peu importe.

béa a dit…

superbe ton texte nos ados devraient le lire et en tirer des leçons de vie !!!